juillet 2018

1. 15:57, dimanche
"Each is a reminder of who I was — a young girl uprooted, yearning for elsewhere and other people — and each has the power to reconstitute how I understand myself to be in the present. These relics, or tokens of the past, orient me to myself."
http://reallifemag.com/nostalgia-for-permanence/

le trois, mardi, vers dix huit heures
où je me rends compte que le travail en lui-même ne fait jamais parti de mes soucis d'écriture et que j'aimerai tenir à l'instar des anthropologues un journal d'exploration,
toujours la crainte de l'évaporation dans le temps
retenir
la roue du vélo dégonflée ou crevée, épuisement jusque dans les outils
le vide laissé par le départ de q. est immense,
le travail me coince dans un quiproquo d'intentions
la maraude : des êtres en perdition voguent dans nos filets de café
(la tristesse vagabonde)
quand est-ce que l'apprivoisement se conclue et que vient-il ensuite
forcément certaines personnes m'intriguent plus que d'autres, des rencontres touchent les lieux de ma curiosité et de mon souhait de support, ce vieux monsieur barbu qui tient ses intestins qui sortent de son nombril, il est référencé et je voudrais que son regard sur moi soit teinté de confiance
serrer la main, rappeler des choses qu'ils ont dit pour attester de la présence continue, marquer le non-oubli
un autre monsieur, plein d'alcool et enfantin dans son élocution petite du français, qui s'endort presque à mes côtés, je l'observe comme pour le prendre en photographie et il me demande pourquoi je le regarde ainsi
comment ne pas déranger

je suis trop jeune
incombée

/recouvrir l'absence

je suis dans cet appartement de passage à 800 km de chez moi depuis deux mois pendant encore deux mois, c'est long et c'est loin sans appartenir à un lieu habité par soi-même

Ce sentiment d'étrangeté donne à mon regard froid un dégoût des murs blancs et de la poussière qui ne semble pas être la mienne
Je me sens mieux assise par terre sur le trottoir à offrir un café et ma présence aux gens de la rue, là je retrouve un bout de mon identité, dénudée dans le vide de cet espace transitoire
le quatre, au travail ;
Comment me dépatouiller de l'héritage de la maraude.

le 5, vers onze heures; le vide las
Délitement
(dans la pénombre de la pluie nuageuse)
je ne sais pas de quoi me nourrir (tentative avec leaves of grass échouée)

le 6, flash en lecture : maintenir

5:43, un vrai clavier (je me souviens de ma découverte enjouée de l'écriture sur tactile et comment l'outil forme la pensée, je ne sais plus quel est le support qui me convient en ce moment, perdue)
je me sens étrangère au travail, cet après-midi je suis allée avec une collègue visiter *, j'ai observé les autres qui travaillent, qui effectuent leurs métiers et je me sens terriblement inutile, je suis admirative des travailleurs sociaux, je ne pourrais clairement pas faire ce qu'ils font au quotidien, dans le fond je crois que la question du sens se présente
je vais essayer de faire une petite sieste avant la maraude de ce soir.

le 11. post-psy ou la séance ratée : "pas si ouvert que ça finalement"
sur la question de l'ouverture, de l'ouverture des portes de l’ascenseur quand je rentre tard le soir, des fenêtres et des rideaux derrière lesquels peut-être des ombres m'attendent, des cadavres et du sang
mais finalement, la question de l'ouverture de soi, de comment s'ouvrir sans s'effondrer, tu sais l'idée de fragilité comme dispositif de rencontre, sans tomber, toujours la chute en murmure dans les creux de la parole
plutôt que l'ouverture du discours sur l'université conservatrice et ses maîtres contre qui l'énervement d'autre chose se ligue
le psy s'amuse d'avoir trouver une ronde, une petit boucle qui tournoie, et j'entends en fermant sa porte le début et la fin de la séance et son sourire "pas si ouvert que ça finalement" et je pense à ce que je n'ai pas dit.

Le 14, "aménagement du préalable"

le 21, samedi soir, après une sieste longue, prélassée
hier soir, maraude étrange où l'on a réussi à emmené Mr S. aux urgences - il traîne une hernie depuis six mois et ne se soigne pas, son bide est enflé, une boule sort de son nombril et grossit à vue d'oeil, les chevilles se sont enflées aussi récemment, la douleur gronde de plus en plus sourde ; et il ne se soigne pas.
on avait réussi à lui faire sa cmu en maraude, mais il ne venait pas en permanence chercher son attestation; on a pris son courrier et on est parti, tout en sachant que nous le trouvons jamais deux fois au même endroit, insaisissable personnage tant dans les lieux qu'il occupe que dans son discours
il voulait aller aux urgences de la clinique, il nomme l'hôpital publique une boucherie, la dame à l'accueil était gentille, il connaît son numéro de sécurité par coeur, la petite salle d'attente fait résonner sa voix, qui mélange des souvenirs, des peurs et des blagues ; les autres patients à côté se décalent ou sourient. il accepte qu'une de nous l'accompagne un peu plus loin, dans la consultation avec l'infirmière ; je reste à l'extérieur, entendant quelques fois sa voix s'exaspérait, notamment, comme je l'apprendrais un instant plus tard, quand le médecin est venu lui triturer le nombril pour lui annoncer que la clinique n'avait ni le matériel ni les compétences pour le soigner, une hypothèse de cirrhose du foie déclarée
(je me demande si l'odeur de rosé et l'aspect presque clochardisé de Mr S. n'était pas un élément dans le refus de ces gens)
nous sommes donc allés à la boucherie,
et ce fût long

26, jeudi matin au travail (maraude annulée ce soir)
la séance ratée : "qu'est ce qui vous arrête ?" "je fais des tours"
Je fais détour car quelque chose est venu sur la trame de la pensée et ensuite je n'avais pas encore envie d'en parler.
Pourquoi je pensais la veille au fait que j'étais une enfant très sage et pourquoi j'y repense comme quelque chose que je n'ai pas dit

jeudi soir, 23:41 tiens. maraude annulée demain également donc je retourne travailler le matin et 'quelle horreur' comment font ils ces autres pour se lever si tôt

Où sont les mots nouveaux

minuit trente, le sommeil ne vient pas
je m'imagine chez le psy : la clinique des déchets l'été dernier, comment je rangeais tout même quand je jettais, comme le côté écolo non gaspillage était aussi dans la mouvance de ne pas mourir finalement
j'aimerai lui parler de cet impossible incarnation en un métier, l'étrangeté du statut rôle au travail



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